Je l'intitulerais sobrement : "ma vie (et celle de Taylor Kitsch)"

Autant le dire tout de suite, je vois pas de quel droit je t’autoriserais à connaître ma vie. Chut ! Laisse-moi croire que j’ai un minimum de contrôle là-dessus. Je ne peux pas imaginer que tu n’en as juste rien à secouer de mon parcours d’auteur paumé au milieu d’un milliard d’autres auteurs paumés. Je sais bien que j’ai jamais fait Hollywood, même par l’entrée des employés. Mais je m’y crois vachement, si ça peut avoir une influence quelconque. Strass, paillettes, un beau mec différent dans mon lit chaque nuit, mort par overdose au fameux âge d’or de 27 ans pour obtenir l’aller-sans-retour dans la case « légende ». Puisque je suis grand seigneur et que je sais que ça t’intrigue au plus haut point (si, voyons), sache qu’il me reste un peu moins d’un an pour accomplir tout ça.

Pour être dans le ton, faudrait parler d’écriture : je suis un auteur tout à fait reconnu dans le milieu (ma famille) et j’ai même eu droit à une publication (non, une vraie.) Le parcours qui m’a lancé dans cette passion est tout à fait unique : un jour, je devais avoir aux alentours de trois, quatre ou cinq ans (à un ou deux ans près), j’ai découvert un petit objet magique qui s’appelle stylo. Ou crayon de couleur, c’est bon, ne jouons pas sur les mots. Et ça faisait des trucs, tu peux pas savoir ! Du rose, du bleu, du vert ! Et des mots. Magique, te dis-je ! Alors tout naturellement, j’ai commencé à écrire. Il est très important aussi de savoir que je déteste les crustacés.

Je te vois venir avec tes gros sabots. Non, je ne suis pas mesquine. J’en ai, de l’ego, et je rêverais que tout le monde se précipite sur les détails de ma biographie avec avidité. Mais voyons la vérité en face. Est-ce que ça t’intéresse vraiment de connaître mon premier mot ? Moi ça m’aurait vachement plu de savoir quel était celui de Taylor Kitsch. Je ne suis pas Taylor Kitsch. Je ne suis pas la moitié du quart du huitième de Taylor Kitsch. En terme de célébrité, je parle. Si tu ne connais pas Taylor Kitsch, imagine un peu ce qu’il en est de moi ! Je ne te connais pas, tu ne me connais pas, et à moins qu’on soit voués à devenir soit amants, soit les meilleurs amis du monde (ou que j’exerce sur toi une fascination malsaine, ce qui n’est pas la plus réjouissante des options), j’imagine, avec tout ce que j’ai d’ego, que ma vie, tu t’en fous. Je ne t’en veux pas ! Je me mets à ta place, et moi aussi je m’en fous de ta vie. Mais alors com-plè-te-ment ! A moins que tu t’appelles Taylor Kitsch, auquel cas…