Seduction

lilaa

C’est mon nouveau dada, ma nouvelle ritournelle. Oh, tu peux le penser,  Journal, je sais, j’en ai déjà beaucoup (...)… Mais voilà, depuis deux semaines, j’explore avec lui le Kama Sutra, je pratique l’art de l’origami avec mes membres et les siens, je suis un Valmont féminin, Marquise De Merteuil puisqu’elle porte un nom, tout cela dans l’espoir qu’il ne puisse plus se passer de moi. J’applique les règles dans lesquelles je croyais, puisque je le sais, l’amour fonctionne ainsi : un mélange de vocabulaire existant, d’orgasmes incroyables, de phéromones, de confessions sur l’édredon, de fonds musicaux, de regards appuyés, de perfection simulée, d’habitudes, de mystères que l’on veut percer…

Je lui sors le grand jeu terrien : je prends soin de lui, je le charme, je joue les acrobates, je lui cuisine de petits plats, je joue les effigies Lancôme s’étirant langoureusement, Baz Lurhmann à la réalisation… Je ne croyais pas un jour en venir à ces stratagèmes, mais il n’aura suffit que d’une expérience extra-terrestre pour que ce soit chose faite.

Face à toutes ces attentions, il finira bien par succomber au succulent succube, sans même qu’il le sache. Peut-être qu’il ne pourra le reconnaître, que ses raisonnements ne trouveront pas les mots, mais il m’aimera, oui il m’aimera. ….

Il est comme un enfant vivant dans un monde intacte, il ne sait pas le piège que je lui tends, avec mes mains tendres, mes lèvres souples, mon esprit intriguant qui ne le mérite peut-être pas. Je l’embrasse, je l’embrasse encore, car là-bas les baisers ne sont pas très utilisés, ce ne sont que de vulgaires mise-en-bouche, mais moi je vais changer cela, je vais les imposer, je vais en faire, comme sur Terre, l’ancre à laquelle on suspend son espoir de romantisme, le crochet auquel on laisse volontairement son cœur d’artichaut se déchirer, s’épandre, perdre ses feuilles …

Et je l’entraîne dans des choses qu’il ne connaît pas, il ne les comprend pas encore -je suis son aîné dans ce domaine-. Il me subit patiemment car je suis l’Excentrique à ses yeux, mais peu importe. Je serai un jour récompensée. Il finira par aimer cette présence, cette différence. Un matin, comme un mioche apprenant un nouveau mot, il finira par l’utiliser, tout fier et satisfait de le placer sur une réalité, même si je ne fais qu’accumuler les suppositions et que c’est désolant.

Ah ! Tiens, oui, il se pourrait bien que ca rentre dans la case. Ca y ressemble. Ca s’emboîte bien. Ca correspond. C’est peut-être ca, l’amour dont elle parle…

Et tant pis si je ne suis pas tout à fait moi-même dans le processus, ce n’est pas grave après tout. Peu importe si j’use de subterfuges et de ruses, tout le monde le fait depuis les débuts de la littérature.

Pouvons-nous prétendre, de toute façon,  être une seule et même personne ?

Nous sommes et c’est tout.

Juin 2009

Signaler ce texte