Fils

Tu sais petit, ton papa il t'aime, mais c'est un con. Il t'imposera ses choix, en prétextant que c'est pour ton bien, la vérité, c'est qu'il ne pourra jamais cerner où se trouve ton bien. Ton papa est tellement con, petit, qu'il na jamais su trouver où était son propre bien. Tu sais, petit, ton papa il t'aime, ta maman t'aime aussi, mais les enfants ne sont pas les seuls à faire des bêtises, papa abuse du pastis, l'amour de maman devient factice, l'un des parents devient solstice, et tu n'le vois qu'deux fois par an. Tu sais, petit, j'vais pas te donner beaucoup de conseils, faudrait que tous les grands arrêtent d'en donner d'ailleurs, parcequ'ici bas, à mes yeux, personne n'a fait ses preuves. Cherche ton bien, petit, cherche ton bien. Et si tu le trouves, sache qu'il n'est que tien, les autres n'y tiennent pas, et c'est très bien comme ça. Crois, en dieu, si tu veux, petit, en n'importe quel dieu, pourvu qu'il serve ton idée du bien, et qu'il n'affecte pas trop celle des autres. Est-ce que papa croit en dieu? Il y a cru petit, il y a cru, il n'y croit plus, il y croira quand la crainte croîtra dans son croulant coeur à moins qu'il ne meure en croix avant cela. Qu'est-ce que l'amour? Papa ne sait pas. Enfin si, papa sait, l'amour, c'est compliqué, petit, l'amour c'est plein de choses,il y a autant de formes d'amour que de personnes qu'on aime, l'amour c'est sain et malsain, c'est un écrin de velours enserrant ton coeur, ou une vierge de fer qui se referme sur ton corps. L'amour, petit, ça se picore, sinon ça écoeure. Ca se trie car, vite, cela s'écorne. L'amour c'est bien petit, l'amour c'est beau, mais cela ne fait pas tout, sache qu'on se servira de ton amour pour te désarmer, te mettre un mors. Faites l'amour, pas la guerre c'est joli, mais désuet face à la mort, et la guerre dans ce cas n'a pas que des torts. Eloigne toi de la drogue, petit, tâche de mettre loin de toi vin et opium. Réfléchis par toi même, pense, crée par toi même! La drogue est un remède nocif à une maladie dont on ne guérit jamais. Apprends à savourer le temps libre de toute activité. Si un soir, dans les draps de ton lit, tu vois en toi venir l'ennui, pense à admirer la nuit, la splendeur du noir, regarde l'étoile vois-y l'espoir. Et si, malgré tout, petit, tu désire t'ennivrer, de chanvre, de peyotl, ou d'autres fumées, fais le avec parcimonie, et jamais en dépit de ta vie. Instruis toi, petit, lis, sens, écoute, regarde, goûte, mais méfie toi de ce que l'on te propose, apprends à faire tes choix. Ne compte pas trop sur l'école, petit, mais vas-y quand même, prends ce qu'ils te donneront, ne leur offre rien, garde pour toi ta sagesse et ton esprit, ne croit pas en leur promesses, petit, promets toi à toi même et crois-y fort. Eloigne toi de l'inutile, petit, si ton seul plaisir est dans les profilées et coûteuses charettes sportives, conduis les toutes, papa ne veut que ton bien. Mais méfie toi du clinquant, du gadget, étonnes toi de voir que la plus petite des pâquerettes est bien plus sophistiquée et bien pensée, que le plus rutilant des smartphones. Construis, ton foyer, réapproprie toi la terre, celle qu'on ne cesse de nous voler, prends les armes s'il le faut, pour garder claire ta conscience, fais en sorte de ne pas la tâcher, petit, une conscience ne se nettoie pas. Rassemble ta tribu, forge toi une identité. Sois un Homme, petit, et pas un de ceux qui croient l'être grâce à leurs biceps, où à leur soi-disant réussite sociale, qui soit dit en passant ressemble plus à un écrasement narcissique de l'autre qu'à une quelconque réussite. Non, sois juste un homme petit, un homme qui vit pour sa famille, un homme qui respecte sa femme, un homme qui aime ses enfants. Voilà petit, papa a fini pour ce soir, je ne sais pas si tu dois tenir compte de tout cela, comme je te l'ai dit, les grands n'ont pas toujours raison. Tout ce que je peux te dire, fils, c'est qu'il faut que tu fasse en sorte d'avoir quelque chose de mieux à dire lorsque tu écriras au tien.