PREMIER AMOUR

Y K

J'ai rencontré mon premier amour dans un garage.
C'était un dimanche, j'avais quinze ans, et nous rendions visite à des amis de mon père qui avaient décidé pour des raisons hippies de s'enterrer dans un trou perdu de la Bretagne profonde.
Fin prêt pour un après midi d'ennui extrême, j'étais à mille lieux de me douter que cette journée allait changer le cours de ma vie à tout jamais.

Alors que les sempiternelles discussions d'adultes battaient leur plein, je m'étais aventuré dans les recoins de cette vieille baraque de ferme remplie de bric à brac hippy pour finalement pousser la porte du garage.

C'est là que je l'avais découverte, seule, silencieuse, magnifique. Pourquoi diable était-elle restée dans le garage, je n'en avais pas la moindre idée. A vrai dire cette question ne m'avait même pas effleuré l'esprit. 
Je l'avais observée, muet, un brin intimidé : elle était clairement plus âgée que moi. Elle non plus n'avait pas émit un son. Elle dégageait quelque chose d'imposant, de troublant, qui forçait au silence. J'étais pourtant loin d'en être à ma première expérience, mais j'avais aussitôt senti qu'avec elle, ce serait différent.

Toujours dans le silence le plus total, je m'étais approché doucement et l'avais effleurée du doigt. Elle avait lâché un soupir, si doux et profond à la fois qu'il m'en avait donné des frissons. J'avais poursuivi mon exploration, l'effleurant en divers endroits jusqu'à ce que n'y tenant plus, je finisse par la contourner et me mette derrière elle. Peut-être aurais-je dû être plus sensible, plus doux, mais la fougue de mes quinze ans couplée au désir brûlant qu'elle avait allumé en moi avaient relégué au loin ces vagues velléités de délicatesse.
Sans plus attendre, je m'étais mis à la frapper, maladroitement dans un premier temps, puis, enhardi par ses réponses, de plus en plus fort, jusqu'a ce qu'à son tour elle devienne plus bruyante- à ce stade, je ne peux clairement pas parler d'autre chose que de bruit. Je ne m'arrêtais plus, enivré de bonheur, me perdant avec délice dans cette extase des sens que je n'avais jamais ressenti de manière aussi forte.

C'est alors que mon père et ses amis, sans doute alertés par le vacarme, avaient fait irruption dans le garage. Le coeur battant, pétrifié à l'idée de la réprimande, je m'étais figé. Mais à notre vue, un sourire avait éclairé le visage de mon père.

- Je vois que tu t'amuses bien, avait-il fini par dire en s'approchant. Mais tu n'as pas besoin de la taper comme ça, avait-il ajouté en posant à son tour sa main sur elle. Apprend à être plus fin. Tiens regarde :

Il s'était mis à la tapoter doucement et elle avait soudain émit des sons nouveaux, subtils, remplis d'émotions. Rien à voir avec le vacarme que j'avais généré. Je réalisai alors pour la première fois quelle chance j'avais de pouvoir bénéficier de son expérience et me promettais de tout faire pour en tirer le maximum.

J'ai connu bien d'autres aventures depuis, au gré des rencontres, des voyages, des expériences. Mais à tout jamais restera gravé dans ma mémoire cet après midi d'automne où pour la première fois, j'avais découvert le plaisir indescriptible procuré par ma première batterie. 

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