Sirius (the black cat)

Alex De Querzen

PUBLIÉ SUR http://www.alexanderdequerzen.com/texte/sirius-the-black-cat/

Miaow. Manière des chats de dire bonjour.
Mon maître m’ayant inculqué un minimum de manière féline, laissez-moi me présenter.
Je m’appelle Sirius. Alias le chat noir, Bagheera, Bass, Black Cat ou encore BC. Voire connard quand j’ai fait un truc qui ne Lui plaît pas.
Je suis un… chat noir comme les plus perspicaces d’entre vous l’auront deviné.
Je suis un peu spécial. Médium sur les bords, utilisateur du Dell (noir) de mon patron qui, s’il n’est pas noir, a au moins l’âme de la même couleur.
Pas forcément de manière volontaire, mais plutôt un état de fait.
Vous avez vu comme je miaoute bien?
Normal, mon patron, mon maître (et celui de ma copine Kitty) est bel et bien Alexander de Querzen.
Ah oui Kitty je n’en ai pas encore parlé d’elle, mais ça va venir.
Chaque chose en son temps et les chats seront bien gardés par les hommes gris. Vous ne comprennez pas? Bon, j’y reviendrai plus tard.

Reprenons l’histoire. MON histoire. C’est vrai, Il parle bien tout le temps de lui, alors pourquoi je ne parlerai pas de moi hein?
Donc.
Je suis né aux environs du mois d’avril 2003. Exactement quand je ne m’en rappelle plus.
Je me rappelle pas trop de mon “sevrage”, mais bon je sais qu’Il a déjà vu ma soeur. Elle s’appelle Angelina. Et elle est quelque part dans le sud vu l’accent qu’Il prend pour en parler. C’est à base de “putaing” ou de “èncuulé”. Ca me rappelle un sketch d’un humoriste un peu petit et un peu pas drôle. Comme quoi, “putaing” et “èncuulé”, eh bien ça remplaçait la virgule et le point. J’ai pas tout compris. La virgule je connais pas, mais le poing, miaow, ça oui. Il l’a léger.
Bref, je disais. Je suis un chat donc noir comme mon nom l’indique. 7 kilos de musclograisse pour un bon 90cm, queue comprise.
Celle qui sert à me diriger au cas où je tomberais, pas mon zigouigoui. A ce niveau là, pas de danger, Il m’a castré. Plus pratique, Il m’a dit que je commençais à faire le con dans son appart.
Parlons en de son appart. Des fois je me demande s’il est conscient de l’endroit où Il vit. J’en n’ai pas l’impression.
Plutôt l’impression qu’Il s’en fout de tout. Préférant vivre dans la crasse, mais vivre Sa vie que vivre dans un endroit salubre. Je ne sais pas.
Il est réglo au niveau de la bouffe, je sais qu’Il préfère qu’on mange plutôt que lui. Pas la même histoire pour la litière, même ça s’est récemment arrangé.
Niveau caractère je suis plutôt cool. Bon faut pas déconner non plus, même si j’ai le poil comme une peluche, je n’en suis pas une et j’ai mon caractère.
J’ai entendu dire que j’avais le même caractère que lui. J’espère pas, et je ne le pense pas.
Lui est à la limite de la folie furieuse. Son cerveau doit manquer de connexions, peut-être à cause de tout l’alcool qu’Il ingurgite. Mais bon.
J’avoue que faut pas compter sur moi pour les caresses et les ronronnements. Je laisse ça à Kitty. Elle le fait très bien.

Bon c’est bon, j’arriverai pas à m’en défaire.
J’avoue tout votre honneur. Même si je peux rien faire, j’ai une copine. Elle est aussi tigrée que je suis uni, et elle semble être plus jeune que moi. Mon maître dit qu’elle a deux ans de moins que moi, je Le crois. Et donc elle s’appelle Kitty. Il a choisi ce nom à cause du fait que c’est une machine à ronron. Moi je suis Sirius à cause d’Harry Potter. Quoiqu’Il use souvent du nom générique de “le chat” pour me désigner. Je crois (et j’espère nom d’une souris) être son préféré. Même si Kitty essaye régulièrement de me piquer le titre à grand renfort de ronronnement, yeux doux et autres câlins félins. Je crois qu’Il apprécie mais qu’Il aime aussi ma manière de mettre des vents quand j’en ai envie et de vivre ma vie.
C’est vrai Kitty et moi sommes complètements différents. Et du coup parfaitement complémentaires.
Mais je l’aime bien. On joue bien ensemble et du coup je me sens moins seul la journée.
Bon, faut pas pousser, la journée on dort, la nuit on joue. J’aime bien dormir, c’est reposant. La meilleure position c’est sur le canapé ou (mieux) sur le coussin. La tête sur les pattes avant et hop c’est parti pour une sieste. Pour ça Il est compréhensif et me laisse dormir tout mon soûl en général. De temps en temps Il me réveille pour m’emmerder, mais sinon Il est réglo. J’avoue quand même que de temps en temps la nuit je me mets à discuter tout seul. Comme le jour et la nuit c’est assez pareil pour moi étant donné que mon emploi du temps se résume a dodo-miammiam-popo. J’aime bien quand Il dort, Il ne me fait pas peur.
Tiens, Il m’appelle aussi Memento. Du fait que j’oublie ce que je suis parti faire. Genre je me lève, je vais dans une direction et d’un coup je fais demi tour pour aller bouffer des croquettes (light étant donné mon surplus de kilos). N’empêche je Le tiens personnellement responsable de mes plus grosses peurs.
La pire étant celle du jour où Il a complétement craqué. Là, miaow, j’ai eu très peur. Tellement peur que je n’ai pas pu sortir d’en dessous du lavabo pendant au moins une journée. A peine si j’allais dans ma caisse ou manger. Même s’Il n’était plus là.

Bon faut que je résume quand même les deux années que j’ai vécu en couple avec lui. On était bien tous les deux. Même s’Il fumait des cigarettes bizarres et qu’Il buvait de l’eau qui pique, Il n’oubliait jamais mes croquettes et mon eau. Et ça, de mon avis c’est le plus important. J’ai vu tous ses amis, ce sont tous des gens cools. Et quand quelqu’un était pas assez bien pour Lui, je le montrais.
Je me souviens la première fois où j’ai vu ses parents. Je dois avoir attaqué le mâle une bonne demi douzaine de fois – miaow c’est pas de ma faute, il tentait de me piquer le fauteuil que le maître m’avait offert pour mon usage personnel -, et tenté de faire copain copine avec la femelle. J’ai pas tout compris je venais jouer avec elle et je partais quand elle criait. C’est de sa faute aussi, elle m’offre un jouet, elle joue avec sans me le filer!
Bref, mine de rien, on s’amusait bien. Il criait pas trop à l’époque. Je sais que la ville Lui faisait peur, comme moi elle me fait peur. En fait non, moi j’ai peur du bruit, et Lui trouvait qu’il n’y en avait pas assez. Toujours content de sortir, sauf pour aller travailler à la fin, alors que moi, je supporte le couloir, mais pas moyen d’aller se balader dans le hall d’entrée, y’a trop d’odeurs bizarres. Ca le gêne pas. Les humains disent “les goûts et les couleurs”, mais ils ont mal traduit la phrase féline qui seule à un sens véritable : “le goût et les odeurs”.

Comment on change le son ? Voire même plus basiquement, comment c’est qu’on met de la musique? Il en écoute tout le temps le patron, plein de sons différents qui des fois me font mal aux oreilles.
A ce qu’il paraît un des mes noms (Bass) vient du fait que la première fois où je suis venu, Il a commencé à mixer et je me suis endormi dans mon panier… placé au pied des enceintes de 30 kilos watts chacune. D’après ce que j’ai vu dans la lucarne noire avec des images, enfin une des 4 qu’Il a, les humains qui écoutent des rythmes répétitifs, robotiques et métalliques, eh bien ils ont souvent des chiens (espèce que – personnellement de manière strictement nombriliste – je n’aime pas du tout). Mon maître m’a adopté et je suis du coup un des premiers chats technoïdes.
Kitty aussi a pris le pli, on en a discuté une fois où Il travaillait pour avoir de quoi acheter nos croquettes : c’est pas plus mal qu’une autre musique. Et quand Il prend les platines, on se met souvent en mode “sieste musicale” pour pouvoir écouter l’histoire qu’Il nous raconte.
Ah. J’ai trouvé comment mettre du son. J’en parlais à l’instant même. ca s’appelle “Al3x – Cats in the hat mix”. Miaooooowww ça va mieux, je trouve qu’Il est présent.
Bon, j’en étais où? Je sais plus. Pause popo-miamiam. Ca m’aide à savoir où j’en suis.
Ah oui la ville. Il l’aime pas, ça c’est sûr.
Mais j’crois qu’il s’y fait au fond.
Il a plus trop envie que ça de remonter vers la grande ville.
Juste de mener une petite vie pépère et tranquille dans le sud, même s’il ose pas se l’avouer.
Ou si c’est pas dans le Sud c’est ailleurs, mais de se poser.
J’en étais où ? Ah oui, avant.

Déjà son appart. J’en ai parlé.
La bouffe. Oui ça c’est fait aussi.
Je vais finir par faire comme Lui. Prendre des notes et coller des Post-It.
Bref, il se mettait parfois en colère.
Pas forcément quand il buvait de l’eau qui pique ou qu’il fumait ses cigarettes bizarres. C’était plutôt l’inverse.
Il s’énervait, criait, cassait des objets. Je me souviens en vrac qu’il ait cassé des claviers d’ordinateurs, des réveils et je ne sais quoi d’autres encore. Les objets volaient. Non identifiés. Mais ils volaient, ça je peux vous l’assurer. Ça me faisait un peu peur mais il ne s’en ait jamais pris à moi. Au contraire, Il essayait de me rassurer, une fois qu’il était calmé. Ça prenait pas trop. A la fin je m’y suis plus ou moins habitué.
Sauf que les cycles étaient de plus en plus proches. Au départ c’était une fois tous les 2 mois puis ça s’est accéléré. Une fois tous les mois. Une fois toutes les semaines…
Bizarrement, Kitty ne stressait pas trop. Faut dire qu’elle est amoureuse de Lui.
Qui est Kitty ? Bon, Il l’a adopté il y a environ 6 mois. (Attendez, si moi j’en ai 2 et demi, elle elle en a 1 c’est ça le compte est bon) Et depuis qu’Il l’a adoptée, elle est amoureuse de Lui et le Lui montre. Mais je m’entends bien avec elle. On se fait notre toilette, de temps en temps on se chamaille un peu, histoire de.
Je suis donc noir et elle tigré.
Je crois qu’il l’a adopté par pitié quand il l’a vu sous une marche d’escalier.
Enfin c’est ce que j’ai compris de leurs conversations.
Çà vous étonne ? Nous on comprend en gros ce que vous dites, et vice et versa. Mais faut le temps. J’ai mis du temps à faire comprendre à mon Maître pour la litière et pour la bouffe. Mais maintenant ça va. Depuis sa Crise. J’y reviendrai.
Kitty donc. Il l’a ramenée, je l’ai laissée vivre sa vie vu qu’elle me laisse vivre la mienne. C’est pas pareil quand Il est là. Elle fait tout pour être proche de Lui. Parfois ça le saoule. Et moi aussi. J’aime bien la relation qu’on a. Elle est à base de respect, notre relation, c’est de la passion venant de Kitty.
Miow, ça fait du mal aux pattes que de tout taper. Je vais boire et je reviens.
Miam, j’en ai profiter pour manger et faire une petite sieste.

Je me posais la question en dormant de ce qu’il faisait quand on le voyait pas. Quand il est dans l’autre pièce par exemple, dans sa cabine transparente.
Ou qu’il n’est pas là tout simplement. Des fois il me dit qu’il travaille pour me nourrir.
Ça explique pas la cabine.
Il y rentre sans ses poils, et hop dès qu’il ressort il se les remet. Ça dure 10 minutes, et je vois absolument pas ce qu’il peut faire. Peut être sa toilette. Vu qu’après il y a plein d’eau. Mais dans ce cas, c’est un crade, parce que moi, ma toilette ça me prend beaucoup plus de temps. Faut dire que j’ai un peu que ça à faire. En plus de manger et de dormir. Et de jouer. Hé, mine de rien, c’est bien rempli une vie de chat.
Bref, je disais plus haut qu’on communiquait. Faut dire aussi que depuis que Kitty est là, c’est plus facile, on confronte nos opinions sur ce que disent les humains. Et puis on les classifie.
Ceux dont on se fout.
Ceux qui sont inconnus.
Ceux qui sont des amis.
Facile, trois catégories. Je crois qu’Il fait pareil. Il classe les gens dans des catégories. Sauf que les siennes changent tout le temps. Pas les catégories, les listes de gens à l’intérieur. Des fois on voit une personne pendant un long moment et souvent et d’un coup, pouf, plus personne. Disparue.
Avec Kitty, on se met d’accord entre nous sur ceux qui sont bien (les gens qui sont des Amis), et ceux dont on se fout. Ceux dont on se fout, c’est simple, on fait comme s’ils n’étaient pas là. Enfin moi, parce qu’elle, elle gratte des câlins. Tout ce qui est bon à prendre, elle le prend. Moi c’est pareil pour la bouffe que j’aime.
J’ai faim, d’en parler ça m’a ouvert les crocs.
Je reviens.

J’discutais avec Kitty sur le balcon, c’est vrai qu’on se pose autant de questions que vous les humains. On se demande ce que vous faites et quand est-ce que vous évoluez. Moi, Alex, je l’ai bien vu.
Il y’a eu un avant.
Et il y’a eu un après.
Je parle de sa Crise. Celle du 2 mai 2005. Où il a complètement craqué. Et où il m’a fait super peur. A tel point que Kitty et moi on s’est cachés pour éviter que le ciel ne nous tombe sur la tête.
Je sais qu’il s’en est voulu. Et que même un an après, il s’en veut toujours autant si ce n’est plus.
Pour en revenir à sa crise.
C’était un mardi. Ce devait être une journée ou plutôt une soirée comme toutes les autres. Voire même mieux que les autres vu que c’était préparation pour une soirée je crois. Une Cemetary Party.
Cimetière. Le mot était – malheureusement- bien choisi. Il s’est enterré lui-même. Il a bien failli ne pas en revenir. Même Kitty a eu peur. Pourtant, lui, elle l’aime. Je sais qu’elle avait un autre nom avant, Lou. Mais ça Alex en parle peu. C’est quelque chose qui lui fait mal. Très mal. J’ai l’impression qu’il a beau se laver, beau passer du temps à écrire ou à mixer ou à créer, c’est toujours une blessure ouverte. De ce que je peux voir de ses papiers, il doit écrire un texte sur l’histoire là, son fameux ” Lettre à une absente “.
Je sais qu’il aime le film V for Vendetta. V pour Vengeance si je traduis bien ses notes. Ça doit le travailler…
Miaoow… Je vais aller dormir un peu, le temps de réfléchir et de me remettre dans le bain de ce mardi noir. J’en tremble d’avance. J’aime pas me replonger là-dedans. Un an après, j’ai toujours aussi peur que ça recommence. C’est le début d’une période bizarre. Il y a eu un avant, un après, et un maintenant. Bon ce n’est qu’un avis de chat (le mien plus celui de Kitty) mais ça a l’avantage d’être brut de décoffrage. Sans retranscription ou traduction ou édulcoration. J’ai déjà le plan.
Grand Un (Prologue) – Avant sa Crise.
Grand Deux – Sa Crise
Grand Trois – Après sa Crise
Grand Quatre (Epilogue) – Maintenant.
Je sépare le grand trois et le grand quatre (l’épilogue) car je sens qu’il y a une différence. Je vois qu’il fait des efforts depuis que nous sommes dans la nouvelle maison.

Bon. Faut aussi que je vous affranchisse d’un truc. On est heureux avec lui. Je crois qu’on est parmi les rares personnes dont Il se soucie. Sa véritable famille est peu nombreuse mais il y tient, même si je vois qu’il se gratte la tête avec force quand il voit comment tourne la relation. Mais bon. Après il y a le Cercle, ses amis proches. Mais nous (Kitty et moi), on est à part. Il est heureux de nous voir. Il caresse souvent Kitty qui se laisse faire (facile, elle pleure dès qu’il est pas là) et moi qui me laisse pas faire (mais des fois j’aime bien me laisser aller pour lui prouver que je l’aime). Bref, passons.

Avant sa Crise donc.
Il bossait beaucoup. Tout le temps. Ne s’accordant des pauses que pour miam. Ou pour faire la fête. Chez lui, ça se résumait à boire. Et à fumer. Il avait deux personnes dans sa vie. Une qui était là, qui venait à la maison. Elle était gentille. Je crois qu’elle essayait de gérer au coup par coup les humeurs d’Alex. C’était pas facile. Plus le temps avançait, plus il tournait en rond, plus il s’énervait contre tout et rien. Et dans ce cas, miaow, fallait pas être dans ses pattes, pardon, ses pieds. On aurait pu se douter que quelque chose n’allait pas rond. Mais au final, nous, à part ses Humeurs, on voyait rien. On avait toujours notre litière (sale), notre eau et nos croquettes. En temps et en heure. Lui par contre, c’était plus chaotique dans sa vie. Passé une certaine date, la fin du mois commençait et je voyais bien qu’il se sentait mal à cause de (ce qu’il appelle) la thune. Je disais. Il y avait Elle, et une autre, je l’ai appris plus tard. Une qui n’habitait pas dans la même ville mais à laquelle Il tenait aussi. Différemment. Je ne sais pas, j’ai pas tout bien suivi. Enfin, c’était le bordel. Une soirée sur deux, il y avait du monde à la maison. Ce qui fait qu’il ne pouvait travailler et que ça l’énervait mais il faisait comme si de rien n’était et participait à la fête. Je crois que de toute façon, son cerveau était grippé, et qu’il se dépensait trop à son travail pour pouvoir avoir l’esprit serein. Enfin, pour être tatillon, il ne se dépensait pas. Il s’épuisait nerveusement. Trop de pression tue le citron qu’il disait. Et ça le faisait rire comme un fou, faudrait qu’on m’explique.

Sa Crise
Comme je l’ai dit, c’était un mardi. Et à l’entendre, s’il y a bien un jour avec la tendance ” drapeau noir ” de sortie, c’est le mardi. Donc. Il est rentré du travail, à une heure normale pour une fois, il devait être 20h, 20h30.
Et je ne sais pas ce qu’il c’est passé.
Je crois qu’il a essayé de remettre le lit en place et que ça a bloqué. Et à partir de là, c’est parti en vrille. La fille est arrivée, elle m’a fait une caresse, mais moi je sentais que quelque chose tournait pas rond. Ils ont commencé à s’engueuler (ou plutôt il lui a crié dessus) et finalement il s’est cassé de la maison. Il est revenu dix minutes plus tard, la gentille fille avait refait le canapé, du coup on pouvait plus s’allonger, et lui il a ramené à boire.
Je dois précisé un truc. Il était sobre ce soir là. C’est important. Je sais que des hommes en blanc on dit des choses horribles. Ou du moins ont répété sans réfléchir les propos d’un homme qui n’avait plus sa raison. Ils ont dit que c’était un drogué. Alcoolique. Mais non. Moi, Bass, et elle, Kitty, on vous le jure messieurs : Alex était normal. Enfin dans la normalité qui à l’époque étaient les standards de sa vie. C’est important je crois de le signaler. Je ne dis pas qu’il était complètement clean, non, mais il n’était pas défoncé.
Bref, alors que nous on était content (surtout Kitty) de le voir, lui, il a recommencé à s’engueuler avec la fille.
Pour rien. Il en oubliait même de fumer ses cigarettes bizarres et de boire.
Encore qu’ils s’engueulent, ça va, on avait plus ou moins l’habitude, c’est un grand nerveux notre Maître. Mais là, c’était vraiment violent. Et ça a carrément dégénéré quand Il a commencé à tout casser.
D’abord la table basse (basse avec un e à ne pas confondre avec moi), une table en verre soi disant Sécurit. Tu parles. Alex a foutu un gros coup de poing dedans et la table a volé en miettes.
Il s’en est pris ensuite aux DVDs qui traînaient. Il les prenait, ils les ouvrait et il les déchirait. Il en a fait une dizaine comme ça, essentiellement les cadeaux. Je sais qu’il pleurait presque déchirant un DVD en moumoute et qu’il hurlait ” les choses matérielles finissent par nous posséder “. Mais c’est lui qui était possédé. Après les DVDs, ça a été le tour des CDs. Pourtant il y tient. Enfin il y tenait.

Après sa Crise
Il a passé un mois loin de la maison. Il nous l’a dit après ce qu’il avait vécu.
D’abord il a été dans un hôpital. Où on lui a donné plein de cachets pour qu’il dorme, qu’il se ” repose ” comme ils disaient. Faut avouer qu’Alex a bien failli mordre la psychiatre qui l’a vu. En tout cas, ils ont pris conscience de son état, et la fille, qui était super gentille, même lui le reconnaît, elle l’a accompagné et convaincu de rester, de se faire soigner, au moins la nuit. Lui pendant ce temps il pensait à l’autre.
Un beau sac de noeud.
Finalement, il est resté, et le lendemain, il y a eu de nouveau bataille avec les médecins. Médecins qui lui ont fait une piqûre pour qu’il dorme, le temps de convaincre la fille qu’il faillait le faire interner. Soit c’était elle qui décidait, soit ils le remettait à la police pour que ce soit la police qui le fasse interner. Si j’ai bien compris, ça lui a évité des ennuis avec la justice.
Du coup, ils l’ont emmené dans un HP. Un hôpital psychiatrique. Et on l’a plus vu du tout pendant deux semaines. La fille passait nous nourrir, elle s’occupait de nous. Avec moi, elle en a profité pour me rassurer. Faut dire que j’avais super peur. Il se marre en disant que je suis la représentation de son état psychique. Moi ça me hérisse les poils : j’aime pas le bruit, j’aime pas les gens, j’aime pas qu’on me caresse. Enfin, pour être plus précis, je ne cours pas après.
Après ces deux semaines, il revenait la journée. Mais ce n’était pas le même. Drogué en permanence. Pas aux cigarettes bizarres. Non, à un truc beaucoup plus fort, qui lui faisait dire n’importe quoi. Et faire n’importe quoi. Il pleurait beaucoup sur son sort. Moi je l’avais connu plus dur, la c’était une loque. Ça, pour du n’importe quoi, c’était du n’importe quoi. Il a mis du temps à se relever. Je dirais environ 3 mois. Parce qu’au bout de trois mois, la lueur est apparue. Pas dans le sens que les gens ont l’habitude, mais pour lui, c’était l’arrivée du messie. Il allait se faire virer. S’en est suivi une période d’un mois où il avait beaucoup de mal à prendre sa décision, car elle allait à l’encontre de ce qu’on lui avait inculqué, mais bon, il a fini par capituler, à ses conditions. Et deux mois après, il était définitivement libre.
Pendant toute la période où c’était fluctuant, il prenait toujours ses pilules, mais ça allait decrescendo.
Il nous l’a expliqué.
1 et tes soucis te semblent moins problématiques.
2 et tu es très calme, passif, mou.
3 et tu te sens fatigué et triste.
4 et tu es amorphe.
5 tranxen et tu es complètement pâteux et tu ne sais plus très bien ce que tu dis/penses/fais.
Evidemment les phases sont cumulatives. Sinon ça ne serait pas rigolo.
Bref, à peu près 5 mois après sa crise, ça allait mieux. Je crois qu’il a fait une rechute qui a nécessité un retour à l’hôpital quand il est retourné travailler la première fois, mais en gros, en septembre/octobre ça allait mieux. C’est là qu’il a décidé de partir vers le nord, parce que la vie dans le sud n’était plus possible, ça lui faisait trop mal.
Et accessoirement c’était trop cher.

Maintenant
Plus d’un an a passé. Nous nous portons bien, merci.
Et Lui aussi. Il est en pleine forme.
Comme s’il avait pris conscience de ses limites, qu’il avait été au point de non retour et qu’il en était revenu.
Ça fait plaisir de le voir comme ça. Il est franc et honnête avec les gens (enfin je crois, je ne le vois pas tout le temps mais il fait ce qu’il veut et le montre), il s’est calmé (je le vois des fois passer la soirée à ne rien faire et à ne même pas toucher son ordinateur). Tout va bien dans le meilleur des mondes, n’est-ce pas Aldous?
Mais je sais aussi que ça lui coûte. C’est des efforts de tous les instants. Y’a des exemples qui ne trompent pas.
Tenez, par exemple. Le week-end dernier. C’était grosse fiesta à la maison. La nouvelle, celle encore plus au sud qu’avant. Et bien déjà il a pas tant bu que ça. Ensuite il a fumé, mais dans la limite du raisonnable. C’est à dire qu’il y avait un temps de latence entre les joints. Pas comme avant où il en fumait un pendant qu’il roulait le suivant. Eh bien, un ami de la fille (nouvelle) qui vit avec nous, a cassé sa tour à fumer. Une sorte de bocal plein d’eau avec un tuyau. Attendez je vais voir si je trouve le nom. Naar-gui-lèh. Ben ce truc, le monsieur il l’a cassé. Et Alex n’a rien dit. Il a juste demandé à ce qu’on sauve les DVDs restant et son affiche. C’est pas du progrès ça? Je crois qu’il s’en fout vraiment de ce truc.
Autre exemple? La fille qui vit avec nous. Ils ne sont pas ensemble, juste, ils vivent sous le même toit et chacun son boulot, chacun ses emmerdes, chacun sa chambre et pas chacun son chat. Bon, on va quand même de temps en temps dans la chambre de la fille, c’est plus propre et ça sent un peu mieux que chez lui mais non, l’appart est correct, notre litière aussi, c’est royal. Et les deux nous en font la remarque, comme quoi vivre une vie de chat avec eux (elle et Alex), finalement, c’est une bonne réincarnation.

NotaBene : Pour préserver l’anonymat des gens, et plutôt que de changer les noms – vous auriez pu les reconnaître avec un peu de sixième sens félin – je n’ai cité que ceux dont je sais que cette histoire ne les blessent pas. A savoir Kitty et moi, Bass. Pour Alex, c’est son histoire et sa douleur. Et je sais qu’il essaye de changer alors…

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