Si vous saviez

mirellehdb

Je me souviens de la sensation du dernier verre de ce vin blanc moelleux que j’ai pris avant de venir ici.

Onctueux, du velours qui coule sur ma langue, dans mon palais jusqu’au fond de ma gorge.

Une sensation de chaleur m’envahit. Mais je suis rattrapée par le ploc ploc du robinet qui goutte.

Il envahit mes pensées jour après nuit, je deviens dingue dans cette taule qui pue la mélasse.

Celui qui passe toutes les heures pour être sûr que je suis encore en vie,

que je souffre toujours du manque d’air, du manque de nourriture, du manque de ciel bleu, du manque de tout, me regarde d’un œil torve.

S’il savait…

Moi je ferme les yeux et les oreilles à cette misère et je m’en vais malgré mes entraves.

Je n’ai pas besoin de vous, je suis libre malgré tout. Libre dans ma tête, libre de rêver ma vie.

Libre de goûter aux mets les plus délicats, de les imaginer dégoulinants de saveurs lointaines, chaudes, sucrées, épicées.

Libre de laisser couler ce jus sur mon cou, sur mes seins qui se dressent de plaisir.

Je respire mon odeur au creux de mes poignets, cette odeur qui se mélange au miel et à l’alcool et m’enivre de plaisir.

Des bras inconnus et multiples me caressent, des paroles lubriques et joyeuses me font oublier où je suis et font ruisseler un tout autre nectar.

Le bruit des bottes contre le métal froid de ma cage me sort de ma rêvasserie. Je lui souris, s’il savait. Si vous saviez.

Vous pouvez tout me prendre, m’enfermer pour la vie, ma liberté c’est mon imagination.

Signaler ce texte