J'étais morte

Colette Bonnet Seigue

J’étais morte

J’étais morte un beau soir où l’âtre éphémère

exultait sa moiteur par mes pores troués.

J’étais morte avant l’heure, celle que l’on espère

effacée à jamais de l’ombre du passé.

Suintez humeurs, suintez viscères

suintez la mort par tous vos maux

coulez par mes larmes amères

vomissez ma douleur, vos miasmes vésicaux.

Et toi, sang échappé au gouffre capillaire,

tu m’as abandonnée dans une orée givrée !

En mon corps orphelin du vermillon-mystère,

la mort a commencé son œuvre inachevée !

J’étais morte en hiver sur la couche de verre

mes poumons emmêlés de souffles torturés.

Un râle singulier, compagnon de misère

m’a insufflé la vie qu’on croyait trépassée.

Partez larmes de feu, partez, ne vous déplaise !

Arrosez-en l’enfer par vos flots étouffés.

Allez sur des yeux fats, sur des regards de glaise,

laissez les miens briller pour une éternité !

J’étais morte en hiver où l’été se déchaîne

en un trop plein d’amour encore à sublimer.

Pourtant, bien des printemps ont chaviré mes peines,

pour les réconcilier aux rires enlacés.

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