L'art nait de la contrainte...

Pourquoi ces douze pieds, ces rimes et ces vers?

N'aurais-tu pas mieux fait d'écrire sans travers?

Que t'apporte ceci, a part de la sueur,

De la page blanche, ce qu'on nomme la peur?

Tu ferais mieux sans ça, cela serait moins dur,

Prends les mots comme ils viennent au fur et à mesure...

Pourquoi t'obstines-tu à tous ces exercices?

Pour cacher ta pensée, sont-ce des artifices?

Pourquoi forcer les mots, toi qui les aimes tant?

Pourquoi les enserrer ainsi dans un carcan?

Ne pas les libérer, coucher sur le papier,

Comme tu le voudrais, tes nombreuses idées?

L'art nait de la contrainte, et ne serait si beau,

Si l'idée du penseur n'avait pas un étau.

Dites au jardinier, d'arrêter de tailler,

Alors j'arrêterai mes vers de rimer!

Si le propre de l'art est de se libérer,

De quoi se libérer, si l'on n'est contrarié?

Mais la condition d'homme, où l'on nait contrarié,

Permet, en paradoxe, à chacun de créer!