Poésie oubliée...

Une vieille armoire, où sommeillent tant d'écrits. Des brouillons parsemés çà et là en feuilles volantes. Des classeurs où des histoires attendent un regard depuis des années déjà. Tout un « bric-à-brac » ! Qu'en restera-t-il au lendemain de mes jours ?

Pour briser le silence de ma nuit, certains m'accompagneront peut-être au pays d'où l'on ne revient jamais. D'autres resteront, et c'est cela l'important, aux mains d'êtres chers, afin que ces derniers gardent encore, année après année, le souvenir des heures, des jours passés ensemble.

Souvenirs de pivoines roses et odorantes ; œillets, au parfum si enivrant, serrés frileusement, timidement, sur le petit puits condamné. Et ces roses, reines somptueuses dans leur robe veloutée !  Les cerises, bien plus délicieuses, lorsqu'elles sont dégustées, chapardées, à même la branche. Et puis, ces courses dans la nature : arbres caressés, bruissement des feuilles au vent, et l'océan si impressionnant, mais si accueillant parfois avec ses vagues douces, domptées, à mes pieds…

Souvenirs pêle-mêle d'enfance, de premiers émois, de naissances : c'est tellement magique, mais les enfants grandissent trop vite… Certains liront, s'attarderont peut-être, sur les poèmes évoquant les clandestins, la bouche déjà noyée, mais le regard encore tourné vers la terre promise… les guerres qui créent tant de malheurs, à cause de fous ivres de pouvoir, les ouragans qui ne laissent que désolation et mort.

Mais après moi, qui se rappellera encore – et qui en parlera - des blés dorés de notre campagne, des poules, lapins de la voisine, des quetsches cueillies à pleine bouche lorsque la balançoire s'envolait…de cette première petite voiture verte « La quatre chevaux ». Celle qui la conduisait sera partie, certainement avant moi – mais nul ne le sait - depuis longtemps. Il y a des souvenirs, comme ça, qui restent pour un temps et puis qui s'effacent…avec le temps. Connaît-on la vie de ceux qui nous ont précédés ? Oui, celle des grands-parents, mais avant ? Si peu de choses !

Et mes chers livres ! Je me suis habituée à l'idée qu'ils seront semés, après moi, aux « quatre vents ». Au moins, ils seront encore lus. Mais j'aimerais juste, que ceux que je préfère, restent dans la famille, et que trois livres : Zola, Colette, Musset soient déposés à mon chevet. C'est avec eux que j'ai découvert l'immense plaisir de lire.

Voilà à quoi je pense parfois, même si je crois avoir encore le temps…mais mes enfants continueront leur chemin, comme moi j'ai continué, après le décès de personnes chères…comme nous continuons tous.

Ainsi va le temps, ainsi va la roue de la vie…ainsi vont les pages semées au vent…