Me casser
Apolline
Toc toc je peux ? J'ai demandé à sa porte. Derrière, des pas engagés m'ont suffi. Alors je suis rentrée. Il s'est assis dans son canapé pour me contempler. Il n'avait pas cessé de pleuvoir. Mon imper était trempé. Debout devant lui, je l'ai fait glisser à terre en lui disant que j'avais beaucoup pleuré, souvent, longtemps, que je n'aimais pas du tout m'apitoyer, que les pleurs, ça me dispersait, qu'ils me faisaient même gronder. Oui gronder comme le tonnerre avec une colère d'éclairs que je voulais rayer. Il n'a pas bougé, ses yeux penchés sur ma longue robe rouge zébrée trop fermée. Les bretelles tirées, je l'ai fait glisser en boule sur le tapis. Je lui ai dit aussi que je contenais vraiment trop les choses. Des choses qui ressemblaient à la peur de lui, peut-être l'absence, peut-être l'abandon, l'indifférence aussi. La peur de découvrir un éclat noir dans le regard, de mains impatientes posées sur ma peau. Dans un geste précis, j'ai retiré brusquement mes escarpins. Des cailloux ont jailli sur le sol. Il a baissé les yeux sur mes pieds que j'avais peints à l'extrémité en bleu. Ma voix grave s'échappait pour affirmer encore ma peur de lui, que j'avais dû la fuir, mais que je m'étais perdue dans la nuit, que c'était compliqué de marcher sans lui, que j'avais l'impression qu'il me manquait une partie. Comment me reconnaître, telle que je suis ? Puis, j'ai soulevé mon corps, oui, je suis sauvage. J'ai enlevé mon slip, oui, je suis fragile. Mon soutien-gorge dégrafé s'est incliné pour tomber en légèreté, oui, regarde, je me suis abîmée, pour ne plus me toucher, pour ne plus me faire toucher. Ne plus avoir à rougir, à pâlir, à servir, ne plus RIEN sentir. Car un homme, ça peut violer, avec sa voix, avec sa bouche, avec ses mains, avec ses doigts. Avec son sexe comme un réflexe… Un homme, ça peut se taire aussi. Ne dit-on pas que la plus grande des violences est le silence ? J'ai repoussé des pieds, les cailloux sur les côtés. J'ai toujours peur d'être dévorée, de me faire manger. Tout cru. Vois-tu, je suis là, maintenant nue devant toi. J'ai rajouté tant de complexes sur mon corps et dans ma tête… Mais mon ventre, il se vexe. Il me pique, il a mal et il me fait mal. Je ne sais pas ce qu'il veut, ce qu'il réclame. Il se plaint, il se vide. Je le maintiens, diaphane. Mais il braille un langage inconnu. Je deviens aveugle et sourdingue. J'ai saisi mon bandeau sur les cheveux pour le poser sur mes yeux. Je n'arrive même plus à articuler. Je ne pense qu'à me casser. Sur le tapis, je me suis effondrée, démantibulée.
Superbe ! Une femme ça peut émerveiller, avec sa plume, avec ses maux
· Il y a plus de 10 ans ·Chris Toffans
Magnifique... Poignant. Des mots tranchants et une fragilité incommensurable. J'adore ! Bravo.
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
Merci Mamzelle plume, pour ton élan et tes ressentis qui me touchent...
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Merci à toutes qui écrivez de faire un peu mieux comprendre à un rustaud comme moi, votre fragilité. Parfois vous semblez toutes si fortes...
· Il y a plus de 10 ans ·dary-crawl
Merci à Toi, sensible Dary d'être passé !
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Chanson pour toi à venir
· Il y a plus de 10 ans ·gill
du coup je te donne le mien
· Il y a plus de 10 ans ·gill
Rhô non, reste comme tu es, tu es parfaite :) Chante moi une chanson de ton cru plutôt ;)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Quand fébrilité, fragilité, violence s'entrechoquent dans une âme, ça donne un coeur qui pleure, un corps qui hurle
· Il y a plus de 10 ans ·gill
Belle Surprise de te voir ici très chère Gill !
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Attention fragile, Je suis très touché par le poids gracile et grave de tes mots. Juste une petite coquille sur le soutien-gorge dégrafée, ne cachez pas ces desseins que je ne saurais voir. A te relire, avec toujours le même plaisir.
· Il y a plus de 10 ans ·valjean
Merci Toi et pour l’agrafe aussi ;)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
De très beaux éclats, je trouve, c'est à la fois un peu brumeux et trouble et c'est ce qui fait tout le charme.
· Il y a plus de 10 ans ·hel
Le plaisir de te lire aussi :)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Super beau texte! découverte du jour petite Apolline qui vient de mon pays!
· Il y a plus de 10 ans ·jasy-santo
L'Amour, ce satané... Quand on y est accroché, c'est foutu.
· Il y a plus de 10 ans ·mark-olantern
Merci de ton passage Mark !
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
:-)
· Il y a plus de 10 ans ·mark-olantern
Un texte bien tourné, un texte fort sur la fragilité
· Il y a plus de 10 ans ·Chris Toffans
Merci pour ton Retour Chris ! :)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Très joli(e).
· Il y a plus de 10 ans ·Un texte qui bouscule!
Frédéric Clément
Ta venue ici l'est aussi.
· Il y a plus de 10 ans ·Merci Fred !
Apolline
Oh rage ! Voilà un texte du tonnerre de Dieu! Passant souviens-toi! ;-))) J'ai pensé à toi, sur ma route, un village: Boutenac-Touvent...Kiss
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Sacré Toi ! sur mon chemin, je te souffle joyeusement un baiser de ma main :)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Donc tu n'es pas loin de moi.... kiss
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Ce n'est pas le bon chemin PACA C'est loin!!!!Snif
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Beaucoup plus de douleurs qu'il n'y paraît dans ce texte émouvant, bravo à toi
· Il y a plus de 10 ans ·marielesmots
Pour ta finesse sur le fil de tes lectures, Bravo aussi :)
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
C'est par le petit chemin aux cailloux, deuxième porte à droite au fond du parc... Le tapis est Persan. Le toutou ne mord pas !
· Il y a plus de 10 ans ·effect
A l'écrire comme ça, fais gaffe, il va y avoir du monde chez toi ;) ... Une teuf WLW, why not !!!
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Super bien trouvé le "Avec son sexe comme un réflexe…". Et le bonjour à Christophe.
· Il y a plus de 10 ans ·petisaintleu
Merci cher Ami, pour le vôtre (réflexe) d'avoir saisi ce texte !
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline