Séant de pose

A suivre partout ton ombre  

Pour m'éclairer dans la pénombre,

Je t'ai escortée jusqu'à ta lointaine tanière

Pour te parer de la plus belle des lumières.

Plongée, contre-plongée, instantané...

Il m'aura fait chavirer ce cliché

Comme l'algorithme de l'aberration chromatique,

Déboussolé devant un hiatus arithmétique.

Jour, nuit, noir, blanc...

Un contre-jour a capté ce doux moment

Comme pour mieux exister hors du temps.

Celui que chérissent tous les amants.

Cadrage, netteté, focale...

Les lignes de tes courbes exposent leurs caresses,

Et seule une mise au point expérimentale

Souligne les contours de ton corps tout en finesse.

Sur-ex, sous-ex, synchro X...

Peu importe le temps de pause,

Du moment que le reflex ose

Déclencher la prise de vue sous X.

Déclencheur, obturateur, retardateur...

Le temps ne compte pas ses heures

Pour que le grain s'imprègne de ta douceur

Et resplendisse sous les projecteurs.

Incidente, réfléchie, diffuse...

La lumière jaillit sur ma Muse,

Donnant au noir la couleur de l'espoir,

Tout en laissant le blanc s'émouvoir.

Bougé, fill-in, filé...

Tout est fait pour faire de l'effet,

Jusqu'à cet indicible piqué

D'où convergent d'irrévérencieuses pensées.

Numérique, analogique, argentique...

La pellicule fige la perspective de tes angles chimériques,

Révélant au passage leur sensibilité graphique

Dont l'objectif ne se lasse pas de rendre féeriques.

Jpeg, pdf, raw, tiff...

Quelle qu'en soit la résolution,

C'est sur cette langoureuse exposition

Que s'est enclenché ce déclic décisif.

CMJN, RVB, luminance…

L'écran ou le papier glacé sur la même longueur d'onde,

Offrant 50 nuances de gris pour toute âme vagabonde,

Comme une extase au milieu de la séance.

Flash, joule, température...

C'est le secret de la juste ouverture

Que de fixer, telle une sculpture,

Ton image aux accents d'autocensure.

Mise au point, focus, fixation...

De tes formes, selon leur inclinaison,

Seules les balances de nuances 

Dévoilent ton intangible élégance.

Jour J, Instant T, Heure H...

Pas le temps de jouer à cache-cache,

Juste saisir le délice de cette fugace pause,

Pour rendre éternelle ta langoureuse hypnose.

Gris, noir, blanc...

L'émotion est fixée noir sur blanc,

Ravivant l'effeuillage de cet instant

Sous l'emprise d'un nu lancinant. 

Approche, incursion, tension...

Le bouton-pression me transforme en espion,

Attisant ce marquage à la culotte,

En quête d'un shoot bien plus hot.

Asa, Iso haut, Iso bas...

Ta sensibilité s'expose de haut en bas,

Captée par l'intensité de l'ampérage,

Dévoilant tes atours de long en large.

Artificielle, tungstène, naturelle …

La lumière ne se reflète pas d'un corps noir,

Sauf sur le tien qui s'entête à ne pas voir

L'étendue de mon désir charnel. 

JL. Sieff, H. Newton, W. Ronis...

Tous ces grands noms auraient apprécié ce supplice

D'être confronté à un plan américain de ton portrait

Pour en capter toute l'intensité de plain-pied.

E. Von Unwerth, B. Rheims, D.Issermann...

De l'autre côté du miroir, elles auraient pu immortaliser l'instant,

Celui dans lequel tu te reflètes impunément

pour faire pâlir de jalousie les démons de Satan.

Diffraction, distorsion, vignettage...

Ça te fait une belle jambe de croire au mirage

Depuis que la cuisse de Jupiter a pris ombrage

Devant l'étalage de tes rouages en partage.

Reflex, hybride, moyen format...

Laisse-moi capturer la soie de tes bas,

Et retranscrire ce quelque chose en plus

Pour faire de toi mon ingénue. 

Canon, Nikon, Leica…

Quoi de mieux qu'une Rolls pour toi.

A moins que tu ne préfères la caresse de mes mains

Pour donner à ta peau ce capiteux grain.

 Photo : © by myself