Encre de soi - Concours WLW "Ecrivez-vous"

 Curieux mélange d’un blond aux yeux bleus typé aryen, prof de math à la logique implacable, et d’une brune à la peau mate typée espagnole, prof de français versée dans la spiritualité, la petite parisienne que j’étais se muta en enfant sauvage quand transportée au Niger, en plein Sahel, je découvris ce monde dépourvu de tout sauf de maladies endémiques et d’insectes rampants.

Je me mis tout enfant à écrire pour dépeindre ce fascinant univers fait de vautours charognards avec qui je conversai en secret à l’arrière de la maison et de singes malicieux qui déambulaient librement dans le jardin.
Dans ce pays de malnutrition et de luttes touaregs, il me fallut échapper à quelques tragédies. La dengue endémique essaya de m’emporter, tout comme ce chef de village qui insista auprès de ma mère pour me marier et m’échanger contre un troupeau de dromadaires...

 Cependant, à la saison des pluies, le ciel constellé d’étoiles m’offrit ses pages où je dessinai les plans de ma destinée: je serais vétérinaire et écrivain, en hommage à l’univers !
Les étoiles du Sahel me servirent de muses, puis les rouges couchers de soleil de l’île Maurice les remplacèrent. L’absence de ma mère repartie en France avec un nouveau mari me poussa plus encore vers la poésie et l’envie de changer le monde à coups de mots.

Ah, quelle chute ce fut de rentrer par la suite en France ! J’eus bien du mal à accepter de vivre dans des chaussures fermées et dans la maison de mon père dont les portes étaient devenues closes.
Mais je survécus.
Je couchai sur le papier mon envie de justice, et y exprimai mes profonds désaccords avec ce que j’observai.
Puis je fus tiraillée au lycée entre des professeurs de français et de philosophie, qui placèrent en moi de grands espoirs et m'inscrirent à des concours généraux, et mon penchant naturel pour les mathématiques et les sciences de la nature, qui l’emporta.
Je suivis finalement la voie de la justice et du Droit que j’approfondis pendant cinq bonnes années.
Puis devenue héroïne de l’Assurance, j’écrivis à mes heures perdues «La Bête de Paname», nouvelle humoristique sur le métro parisien qui fut repérée et éditée fin 2007 par une petite maison d’édition. Mais celle-ci n’en fit guère la promotion, pas plus que je ne la fis moi-même car j’eus à affronter un cancer qui emportait ma mère et les formalités de mon deuxième divorce.
J’usai ainsi de quelques noms patronymiques, quatre en tout avec mon troisième et merveilleux mari, sans compter celui que je me choisis en guise de pseudonyme d’écrivain et qui me parut le seul à même de me représenter : Eleanor Gabriel.
 J'eus ensuite envie de publier «Encre de soie», bien consciente de ce que la poésie ne semblait plus de nos jours avoir la place royale qu’elle avait occupé pendant des siècles.
Devenue écrivain et poète des heures perdues associée au mécénat de mon entreprise, me voilà à vos côtés sur ce chemin joli, la tête pleine de lumière et de désir de créer avec des mots des univers nouveaux où rien n’est impossible. EG