N'est pas catin qui veut...

lilii

Synopsis :

A l’aube de la trentaine et après des  « il était une fois » infructueux, deux amies que rien ne sépare décident de s’inventer leur propre loi : celle des « catins ». Mais pas au sens péjoratif du terme, non.

Elles avaient adopté le mot « catin » pour faire exister ce qu’elles avaient décidé de devenir : des femmes libérées mais surtout, délivrées de leurs névroses...La libération sexuelle, elle la laissait aux Sixties ! Pas question de jouer avec leurs corps et d’explorer les vices sexuels d’hommes en overdose d’ordinaire.

Pour Elise et Lou, être une « catin » ne s’improvise donc pas : c’est une véritable philosophie qui les conduira à faire déborder leurs rêves.

Déguisées derrière ce code, elles vont s’écrire une vie à la merci du hasard et de la spontanéité et tout mettre en œuvre pour vivre leurs expériences librement, au-delà des règles de séduction conventionnelles. Mais le hasard comme la liberté offre bien des surprises… Et les bouleversements, même s’ils sont nécessaires, vont rendre la conquête de la « target n°0 » plus compliquée que prévu. Car selon  « la charte des catins », la « target n°0 »  est la cible masculine suprême : celle qui transforme leur cœur d’artichaut en pépites de tournesol.

Mathis est la « Target n°0 » d’Elise, un collègue de travail qui l’embrasse de temps en temps en libre service certes, mais toujours sur place et jamais à emporter ! Le reste du temps, il l’ignore. Ce qui en fait une cible de choix : il ne lui plait pas mais l’intrigue et surtout… il lui résiste !

Adam, quant à lui, est la « target » de Lou, le seul, l’unique, pour son regard ensoleillé et sa folie. Mais Adam est surtout un homme très convoité, inlassablement entouré de femmes…

Mais avant d’arriver à les conquérir, elles découvriront à quel point il est difficile de devenir des femmes, d’assumer leurs choix et d'être irrésistibles ou énigmatiques aux yeux de tous ces hommes qu’elles croiseront lors de fêtes interminables, de hasards utopiques et d’espoirs qui claudiquent.

Il était une fois, Elise et Lou, deux « catins » contemporaines, à mi-chemin entre le futile et la passion, entre délices et décadence, entre fous rires et désillusion, entre rêve et réalité…                                                    

Chapitre 1:

« Règle n°10 : Il est interdit de « faire du social » avec une Target ; ce qui comprend : remplacer sa mère, matérialiser un fantasme, combler un manque quelconque. »

Et voilà. Elle avait cédé… Elle avait cédé parce qu’elle ne s’aimait pas, elle et ses kilos en trop qui lui collait à la peau depuis des années. Elle était ivre et essayait de suivre le rythme de sa langue affamée qui lui avalait la gorge et lui coupait le caquet. Il était laid, con et désespéré mais il avait perçu chez Elise une capacité rare à « faire du social » et à ne pas savoir dire non.

Elle avait eu pitié de lui, avec sa coupe de cheveux des années « compilations du grenier », son histoire clichée d’homme marié / frustré et puis, il lui avait payé une bouteille de champagne alors qu’elle n’avait même pas de quoi s’acheter des capotes.  Elle avait alors cédé une partie de sa bouche en location-horaire, un squat au rouge à lèvres contre salive fétide de quadragénaire névrosé… « Beurk ».

Il tournait fougueusement sa langue comme un jeune premier, la mèche blonde grisée, impeccablement huilée sur le front, raclant les moindres recoins  de sa gorge comme s’il avait voulu y trouver quelque chose. Elise avait beau s’imaginer la douceur des lèvres ourlées de Mathis, la magie est parfois capricieuse, même après une quinzaine de coupes de champagne.

Mathis est la « Target n°0 » d’Elise. Lou et Elise avaient piqué le mot  « target » aux anglais, littéralement  « cible » pour désigner l’homme que la « catin » veut plus que tout, dans son lit et/ou pour la vie…

(Rayer la mention inutile).

  Il tournait sa langue de plus en plus vite. « Le salaud. » Elise avait la nausée. Elle imagina un instant lui offrir l’intégralité de son repas du soir, haché, moulu, mixé, directement dans le gosier. Alors qu’elle tentait d’échapper à ce prédateur à lèvres, elle sentit une main lui empoigner une fesse. « Quel salaud ! ». Elle repoussa la main intruse d’un geste brusque et maladroit et disparut le plus vite possible dans la foule qui dansait.

 Elise s’était assise entre un couple au bord de la rupture et deux comas éthyliques. Elle se sentait à l’étroit dans cette foule suintante. Elle avait le cœur flou et les jambes qui vacillaient. Elle s’était affalée contre les sièges en ferraille incrustés d'histoires ordinaires et dans un soupir, elle ferma les yeux. Elle se promit religieusement de ne plus boire une bulle de champagne et ce,même si c’était le Prince Charmant en personne qui lui offrait.

            « Beuhhh…T’as le nichon qui clignote ! »

Elise ouvrit un œil. Le coma éthylique tassé à côté d’elle, s’était réveillé et venait de lui hurler dans l’oreille, dans un râle indolent. Avec une touche de provocation, elle plongea la main dans son soutien-gorge. Le coma éthylique écarquilla les yeux. Maintenant, il était visiblement, bien réveillé :le score de Glasgow au plafond ! Elise pensa que ses seins venaient peut-être de sauver une vie et après cette réflexion qu’elle considéra comme absurde, elle se promit une seconde fois de ne plus jamais boire de champagne.

Elle sortit son téléphone portable de son soutien-gorge. La poitrine d’Elise était son deuxième sac à main : à gauche, le maquillage tandis qu’à droite, on y trouvait le téléphone portable.  Une catin a le sens pratique!

Une lumière bleue en intermittence lui signalait un message reçu:

            « J’avais oublié que j’avais de la famille qui arrivait demain, je ne pourrais pas venir, une prochaine fois peut-être, biz. »

Elise éteignit son téléphone. C’était la énième invitation que Mathis esquivait. Elle devait se résigner, elle le savait. Il était clair qu’il ne voulait pas la voir, sûrement parce qu’il l’a trouvait trop grosse, c’est ce qu’elle se disait à chaque fois que quelque chose ne marchait pas. C’était la faute de son corps, toujours.

Elise avait beau faire fuser toute son imagination, elle n’arrivait pas à voir Mathis sans qu’il y ait une boule à facettes, un DJ miteux et de l’alcool à foison. A croire qu’il l’embrassait juste par défaut. Le con.

Et en plus, il avait conclut son texto par « Biz » avec un « Z ». Rédhibitoire. Elise détestait ce mot. Ce mot d’ailleurs, qui n’en était pas un, puisqu’il pouvait à la fois être la contraction de «  bise » ou de «  bisous ». Ce qui, pour une fille aimant se triturer le cerveau pour déchiffrer «  l’entre les lignes » des mecs représentait une énigme insoluble.

Lou entoura les épaules d’Elise. Alors qu’elle était en train de se faire « rincer » au champagne par un joli cœur à paroles, elle avait gardé un œil sur son amie et avait décelé cette petit lueur qu’elle connaissait si bien traverser les yeux d’Elise, cette lueur qui éteignait son regard si vite qu’elle semblait n’être plus que son propre fantôme.

« C’est Mathis ? »

« Mouais… » l

« Viens, on va dehors fumer une clope ! »

A quatre heures du matin, la rue est toujours un spectacle à ciel ouvert où chacun avait un rôle à jouer. Et ce soir-là, Elise et Lou avaient le rôle des filles convoitées. « N’est pas catin qui veut »

Alors qu’Elise allait sombrer dans une de ses névroses qui s’invite toujours sans prévenir, elle venait de croiser le regard d’un homme qui venait de lui révéler le sens de la vie. C’est ce qu’elle venait de chuchoter à Lou. Spiritualité à l’éthanol.

Elise et Lou étaient des jeunes femmes très différentes. Lou était une petite blonde, très mutine avec des yeux féériques, comme si elle avait toujours une petite étoile au coin de la pupille. Elle avait la classe des petites choses fragiles et élégantes. Lou était une fille pudique, qui imprégnait toujours les hommes avec sa douceur.

Quant à Elise, c’était tout l’inverse. Elle était grande et tout en courbes, pas timide pour un sou et plutôt exubérante.

Chacune d’elle attirait un type de mec différent et à nouveau, ce soir, cela se vérifiait.

Adossé contre un mur, un jeune homme, un peu dandy dévisageait Lou du coin de l’œil. Abracadabra, Lou était déjà sous le charme! Il s’appelait « Jim ». Il était serveur dans un bar branché du centre ville. Elise comprit vite que Jim avait pris la place de la Target n°1.

Il n’avait pas encore détrôné Adam, la Target n°0 de Lou. Adam était un ami d’Elise. Elle les avait présentés lors d'une soirée et Lou avait succombé à son charisme de séducteur. Sauf que, bien évidemment, le fan-club féminin d’Adam avait vite refroidi Lou. L’histoire était donc en « stand-by ».

Pendant que Lou buvait les paroles de Jim, Elise s’était faite accostée par le grand black qui détenait la vérité.

Visiblement, la soirée ne faisait que commencer !

Accompagnées de leurs nouveaux prétendants et se dirigeant vers un nouvel hasard, Lou glissa à l’oreille d’Elise.

« Petit rajout à la règle n°10 : …Par conséquent, il est strictement interdit de se taper des sosies de star Has been ! »

Elise regarda Lou sans comprendre.

« Hé oui ma poulette, tu crois que j’tai pas vu tout à l’heure, te faire manger la bouche par le Patrick Juvet, c'est à se demander où sont les femmes ! »

Lou attrapa la main de Lise et bousculant tout le monde sur leur passage, elles firent irruption dans les rues, remplissant la dentelle du silence en mille éclats de rire fracassants

Chapitre 2:

« Règle n°6 : Un crevard n’est plus une Target, c’est un crevard. »

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