Une VRAIE sale gosse

corinne-antorel

Je dédie ce texte à tous les enfants abusés et aux adultes « déséquilibrés » en mal de vivre qu'ils sont devenus, une façon comme une autre à l'approche des fêtes de ne pas les oublier.

J'ai eu la chance sur mon chemin de croix de rencontrer de « bonnes personnes », mais d'autres s'en sont  beaucoup moins bien tirés que moi ou pas tirés du tout.  A eux.  Ames sensibles s'abstenir.

Enfant de cinq ans, enfant du tourment

J'ai grandi en oubliant pourquoi

Je m'étais autant accrochée à toi

Fondue dans tes pas, ma si fragile petite maman.


Ils ont pillé mon enfance, saccagé mon innocence

Ils ont fait du petit être insouciant que j'étais  

Une vraie sale gosse comme il en existe tant

N'ont  laissé dans leur sillage que les ravages  

D'un petit corps maintes et maintes fois torturé

De  mains en mains si souvent passé et profané

Qu'une terre dévastée, des lambeaux de vie gangrénés

Des petits bouts de moi à tout va déchiquetés, éparpillés,

Que je me tue désespérément depuis en vain à rafistoler

Comme je peux, si je peux….mais parfois

Ne crois pas que je ne fais que m'apitoyer sur moi

C'est simplement que j'y arrive pas, j'y arrive pas….


Comment pouvoir leur pardonner, maman, arriver à oublier.

Les graines de haine que dans mes entrailles, ils ont semé

La semence même de leur démence qu'ils m'ont forcé à avaler

N'engendrent en moi rien que la désespérance et la souffrance

Combien d'autres tendres peaux d'enfants ont-ils ainsi exacerbé

Avant que leurs instincts les plus bas ne soient enfin rassasiés.

Nul ne sait…..nul ne sait….

Après s'être délectés de  notre chair de bébé,

J'ai bien peur que jamais…..j'ai bien peur que jamais….

Combien d'autres petits corps d'enfants se sont-ils ainsi appropriés

Avant d'être repus de la jouissance du chaos qu'ils ont engendré

J'ai trop peur que jamais….j'ai trop peur que jamais...

Si tu savais maman, combien depuis je maudis ce foutu instinct de survie qui m'a fait déjouer leurs stratégies de m'éliminer quand ils ont cru que j'allais les dénoncer, car je crève un peu plus chaque jour de cette non-vie qui a pris racine dans mon ventre d'enfant devenu femme et s'est immiscée sans aucune pitié dans chaque fibre de mon être fissuré.

Souvent j'ai envie d'en hurler, tu sais, mais j'ai retenu la leçon, ne crains rien, ce relent de peur, cette odeur de mort, je les garde à l'intérieur.

Et oui, maman, il y a bien des années, j'ai failli faire la une du quotidien du matin : Une fillette de  huit ans retrouvée sans vie droguée, alcoolisée dans une cave de la cité HLM de….violée, aucunes  traces de sang entre les cuisses…sans que personne jamais ne puisse soupçonner le calvaire que m'avait fait subir durant presque trois ans le si gentil monsieur de l'appartement d'en face et ses sbires.

Pourtant en même temps que du poids, enfant, j'ai perdu mes cheveux, souviens-t'en, maman. Les yeux troubles, l'haleine alcoolisée, simples crises d'acétone, rien ou si peu en vérité à côté de la réalité, et puis tellement d'autres choses encore.

Mais rassures toi, j'étouT..fais pour que tu ne vois rien, je cherchais avant tout à préserver la petite brindille que tu étais. Tu n'es pas la seule d'ailleurs, papa ne s'est aperçu de rien lui non plus, bien trop occupé à vouloir asseoir son autorité plutôt que sa progéniture protéger.

Alors à l'approche de Noël, je donnerais sans hésiter, de l'enfant terrifié que j'étais, tous les joujoux, les poupées pour revenir au jour d'avant, celui où tout a basculé et redevenir ne serait-ce qu'un instant une sale gosse au figuré plutôt qu'une Vraie sale gosse au sens propre…..Petite larme.

 

 

  

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