Et non, tu ne mens pas ; tu mens comme tu m’inspires

tzsara

Tu me parlais de l’autre, du goût de son parfum, de tes chagrins noirs et de ta misère du soir. Tu n’étais pas bien. Tu te sentais seule et délaissée et j’étais pourtant là. Tu ne me voyais plus. Moi ! moi, qui ai été à un moment de ta vie toute ta vie. Moi, qui prenais et tes larmes et tes peines. Moi, que tu aimais jusqu’au seuil de la haine. Ose-tu m’oublier ? Ose-tu piétiner de tes larmes l’aura de notre halo noir ? Ose-tu l’aimer ?

Et tu pleurais ta hargne au nez. Tu balbutiais le nom de ta putain à tort et à torchon. Tu me parlais de ses beaux yeux, de son visage et de ses quatre coups foireux. Tu souriais quelquefois en prononçant son prénom et tu te plaisais à le répéter. C*******, C******* revient comme une obsession passagère et me perce le cœur et les oreilles. Chaque lettre me tranche les viscères et me tord le ventre. Chaque son me transperce l’estomac et me taraude les tempes. Je n’ai qu’une envie ; celle de te massacrer et de m’arracher le ventre, celle de t’anéantir et de m’extraire les tripes, celle de te tuer et de me vider le bide. Tu es ma passion suicidaire et tout ce que j’ai de plus noir. Tu es l’enfant de mes veines et tout ce qui me retient en haleine.

Et tu la pleurais encore en hommage à votre amour bleu. Veux-tu mes yeux pour la pleurer davantage ? Moi, je lorgne ma misère les paupières hautes et je maudis ce triste quart d’heure qui t’as mise face à mes yeux. Je ne suis plus. Au rythme de ce discours bavard, je m’éparpillais entre les lignes et sous vos draps. Je m’obstruais les narines et me tiraillais les pores. Je narguais mon égo et me disséquais le corps. Et, je n’existais plus ; sonnée par la brutalité de cet amour sauvage et de la tristesse bleue de l’autre que je n’ai pas vu partir. L’animosité de la chasse m’assourdit l’esprit. D’un mot à l’autre, je te perdais davantage. Et d’un geste à l’autre, je te voulais davantage. Tu te plaignais et chacune de tes larmes me braquait du regard comme pour me dire que tu étais d’ores et déjà partie. Tu te plaignais encore et j’étais là, à la bourre. Tu te plaignais encore et j’étais là, pour faire le joli cœur.

Reviens-moi. Oublie le goût du thé et tous ces parfums vanillés. Garde-moi. Aime-moi. Dis-moi que tu m’aimes ; dis-le, crie-le, encore plus fort, encore plus haut, afin que les mots s’en souviennent. Je me plais à me plaindre quand j’ai les mains vides. J’aime à te peindre quand j’ai mal aux tripes. Et je pianote les notes mélancoliques de notre gai désespoir.

« Et non, tu n’es pas une menteuse et tu ne mens pas aux femmes. Et non, je ne t’en veux pas et comment veux-tu que j’y parvienne. Et non, je ne te mens pas et je n’ai pas besoin de te le dire. Et non, tu ne mens pas ; tu mens comme tu m’inspires. Et non, je ne t’en veux pas, je veux que tu m’aimes. Et non, je ne te mens pas, je veux juste que tu me reviennes. »

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