La bonne blague!

Celui-là, il est pour moi. Je vais me le faire.

Rapide présentation, histoire que vous puissiez vous représenter ma bobine :

Karine, la trentaine, blonde aux yeux verts.

Je suis esthéticienne (faut bien gagner sa vie), mais ma vraie passion, c’est l’écriture. Oui, une esthéticienne, une vraie, décolorée, maquillée et manucurée de frais, sachant aligner trois mots de Français sans faire une faute, ça existe ! Faut croire que c’est rare car les gens font souvent une drôle de tête lorsque j’annonce mon métier. Celui-là hausse les sourcils, celle-là ouvre de grands yeux surpris, un jour une cliente m’a même sorti : « Vous êtes plutôt intelligente pour une esthéticienne ! ». Ce n’est pas l’envie qui m’a manqué de lui répondre qu’elle pouvait aller se faire… Mais je m’égare, là.

Bref, j’écris. Ou j’essaie d’écrire. Selon les moments. Un texte en une heure, ou rien pendant des semaines entières. Ça, ça s’appelle l’angoisse de la page blanche. Perso, je trouve ce dicton obsolète, et faux aussi. Ça fait belle lurette que je n’écris plus sur de la page blanche. J’adore le traitement de texte. Sûrement à cause de M. Villon, mon prof de CM1, qui m’a répété un nombre incalculable de fois que j’écrivais comme un cochon… Sauf que, monsieur Villon, je vous ferais remarquer qu’un cochon, ça n’écrit pas. Du tout.

Bref.

Et si je suis énervée souvent, découragée quelquefois, déprimée occasionnellement, je ne suis jamais angoissée.

Ce doit être parce que je ne suis pas célèbre. Je n’ai rien à perdre. J’écris, ça m’amuse, je publie sur un site d’auteurs plus ou moins amateurs, j’attends les premiers retours avec une certaine impatience et je participe à quelques concours, de-ci, de-là.

D’ailleurs les concours, c’est justement le sujet aujourd’hui.

Comme je le disais, celui-là, il est pour moi. Son thème ? Mauvaise blague. Fait pour moi je vous dis !

Il y a quelques temps, un concours organisé par un mensuel dédié à la littérature et au cinéma nous demandait (« nous » désignant les auteurs de ce site, désireux de parvenir à se faire éditer, publier, diffuser par quelque moyen que ce soit) de raconter un voyage.

L’idée m’est venue tout de suite. J’ai écrit le texte assez rapidement, pas de déprime du traitement de texte ce jour-là. Je l’ai fait lire à un ami qui m’a dit participer aussi. Sa nouvelle, subtile et intéressante, m’est tout de suite apparue comme meilleure que la mienne et à la lecture d’autres auteurs je me suis dit que la concurrence était vraiment rude. Un texte en particulier m’a fait beaucoup rire. Plein de bons mots, son ton décalé et son détournement humoristique de la bible m’ont enchantée. Je le donnais gagnant.

Je ne me faisais pas d’illusion, j’avais lu de meilleures nouvelles que la mienne, mais comme pour chaque concours, j’attendais les résultats impatiemment…

Et je n’étais pas la seule.

J’ai attendu, attendu, ils ne sont jamais venus. Je serais bien allée siffler là-haut sur la colline, mais je n’ai jamais su siffler, alors passons.

Ça a commencé à vitupérer sur le site (j’aime bien le mot vitupérer. Ex-aequo avec valétudinaire et procrastination. J’aime les parenthèses aussi, mais on s’en fout). À ruer dans les brancards. À réclamer à corps et à cris le résultat dudit concours. Y’en a même une qui a menacé d’utiliser une hache pour se faire justice (sûrement une barje celle-là !). On nous a répondu plutôt rapidement (ça fait peur une hache quand même !) que ça allait venir.

Après moult péripéties, le lauréat du concours est annoncé.

Ce n’est pas moi, mais tant pis, allons vite lire ce gagnant tant attendu !

J’avoue espérer trouver lauréat un des excellents textes que j’ai lus les jours précédents.

Et là, surpraïze ! (surprise, quoi)

Un texte épouvantable. Je suis peut-être un peu dure, là ? … En fait, non.

Peu, voire pas d’histoire (des fautes d’orthographe en revanche, ça oui), un style banal, sans originalité et, cerise sur le pompon, l’auteur est un(e) illustre inconnu(e) du site.

Et là, je me dis : Pourquoi ? Por qué ? Why ? Warum ? Perché ? (j’aime m’interroger dans plusieurs langues)

Au début, j’ai été agacée (euphémisme destiné à éviter de dire trop de gros mots très vulgaires). Et puis je me suis dit : « Pas grave ma grande, laisse béton, c’est une mauvaise blague ».

Bon ben voilà. C’est fait. Je vous l’avais bien dit que j’allais me le faire ce nouveau concours !

Au fait, il est organisé par qui celui-ci ?

Je vais voir et je reviens.

…

…

Heu…

Comment dire ?

…

Je ne risque pas de gagner.

Mais je suis contente de ma bonne blague !