La bile noire

tzsara

Seule, avec les traces de tes doigts et la fumée froide de ta cigarette, je gigote. Je suis dans mon élément. Léthargique et le ventre en nœud, je parcours mon livre de brouillon. Tu y es ; dans la tasse vide, dans les mégots noircis et dans le bout de pain moisi. A vrai dire, tu es partout ; dans mon sein et au fin fond de mes tripes, au fond de mes intestins crus et au creux de mon cul. Je crie à l’imbécile superstition ; je te veux. Je crie sans voix, à cor et à cri ; tu es à moi. Ce son inaudible et brutal passe inaperçu. A peine voilée, as-tu vu ma tristesse animale ? Non ! Tu ris aux éclats de mon désespoir risible. Les dieux t’accompagnent en chœur et rigolent de mon malheur. Et moi, je ris mes larmes. Je ris mes yeux. Je ris aux anges de mon bonheur malheureux. Il faut que j’aille percer à coups de massue l’oreille de ces impénétrables cieux. Et je suis là, somnolente et incertaine, froide et accidentelle, au fond de mon lit à pleurer ton absence. Reviens ! Tu es mon impulsion aveugle, ma passion noire et l’éternité de mon inconscience obscure. La cicatrice au creux de la main me rappelle que tu es à moi. Ça me rend heureuse. Et si aujourd’hui je ne peux tristement ni te vomir ni te cracher, sache au moins que je suis ton atrabilaire amoureuse.

Signaler ce texte